samedi 8 novembre 2014

I. Nature de la prière


1. La prière est une élévation de l'âme vers Dieu.

La prière est ordinairement accompagnée de certains signes extérieurs, par exemple on se met à genoux, on joint les mains, on se frappe la poitrine, etc.


En priant à genoux, on reconnaît que l’on est petit devant Dieu ; en joignant les mains, on avoue que l’on a besoin de secours, que l’on est sans ressources, comme enchaîné, comme coupable (Saint Cyprien) ; en se frappant la poitrine, on déclare que l’on est pécheur et que l'on mérite des châtiments. Il  arrive aussi que dans la prière on se prosterne contre terre pour reconnaître que devant Dieu l’on n’est rien ; ainsi fit Judith, avant d’entrer dans le camp des ennemis, Jésus-Christ au Jardin des Oliviers (Matth., XXVI, 39); ainsi font les prêtres, entre autres le Vendredi-Saint et le Samedi-Saint, sur les degrés de l’autel. Dans les prières ferventes, on élève et l'on étend les bras, comme symbole de l’ardent amour de Dieu et de notre union avec la prière de Jésus-Christ étendu sur la croix. Ainsi pria Moïse pendant la bataille des Israélites contre les Amalécites (Ex., XVII, 12) ; Salomon à la dédicace du temple (2 Par., VI, 12) ; ainsi prie le prêtre à la messe.


La Tradition dit que Jésus-Christ priait ainsi quand il passait les nuits sur les montagnes. (Catherine Emmerich)


On peut aussi prier en tournant le visage vers le temple, comme faisait David. (Ps., V, 8 ; Dan., VI, 10) Sans doute, Dieu n’a pas besoin de ces signes pour connaître l’intérieur de l’âme, mais par là l'homme s'encourage lui-même, et il encourage les autres à une prière plus humble. (Saint Augustin) Ces signes ne sont nullement nécessaires dans la prière : on peut les omettre pour un motif important, par exemple,  à cause de la fatigue, de la maladie, on quand on prie an milieu de son travail. On peut donc prier en marchant, comme le font les pèlerins, on ceux qui sont en route au moment où sonne le glas ou l’Angelus.
2. On peut prier mentalement seulement, ou en même temps mentalement et oralement.

On peut prier pendant le travail ou en marchant, sans que personne ne le remarque : c’est la prière mentale. La prière vocale est nécessaire et utile, car l'homme se compose d’une âme et d’un corps, et tous deux doivent rendre hommage à Dieu (Os., XIV, 3). Il est en outre naturel à l’homme de manifester ses sentiments intérieurs (Matth., XII, 34) ; sans la prière vocale, la religion chrétienne n’aurait pas de lien social et tomberait en ruines. La prière vocale excite les sentiments du cœur et augmente par conséquent la dévotion, et la réveille aussi dans le prochain ; faite en commun, elle rend Dieu plus propice à nos prières. (Matth., XVIII).


La prière de celui qui ne prie que des lèvres n’a aucune valeur.


Aussi Jésus-Christ se plaint-il des Pharisiens : « Ce peuple, dit-il, m’honore du bout des lèvres, mais son cœur est loin de moi. » (Matth., XV, 8). Beaucoup invoquent Dieu de la voix du corps, et non de la voix de l’esprit (Saint Augustin) ; les cérémonies qui accompagnent la prière sont aussi sans valeur, si nos dispositions intérieures ne répondent pas à nos actes extérieurs. Celui qui, sans aucun sentiment intérieur, se met à genoux, se frappe la poitrine, etc. est un hypocrite. Il faut adorer Dieu en esprit. (Jean, III, 24) Celui qui prie sans y penser ressemble aux moulins à prières des prêtres indiens.


L'expression la plus énergique de la prière vocale est le chant.


Le chant religieux est une excellente prière : il élève puissamment l’esprit vers Dieu, et saint Paul y engage vivement. (Col. 111, 16). Le chant religieux a été cultivé surtout par David ( t 1015 avant Jésus-Christ), par saint Ambroise, évêque de Milan (t 397) et saint Grégoire le Grand (t 604).



Dans la prière vocale, on peut se servir des formules usuelles ou parler à Dieu d’après sa propre inspiration.
Les formules ordinaires sont par exemple l’Oraison dominicale ou la salutation angélique. Dans les livres de prières on trouve des formules pour toutes les circonstances de la vie, mais il n’en faut acheter que d’approuvés par un évêque, car on trouve dans le commerce des livres composés par des francs-maçons et qui nuisent à la religion. Il faut être prudent, surtout quand on les achète à des colporteurs ou aux lieux de pèlerinages. Mais ce n’est pas de la piété que de s’en tenir servilement à des formules, il faut alternativement parler à Dieu en toute liberté ; Dieu aime bien que l’on s’entretienne familièrement avec lui comme un enfant avec son père.

Ainsi priaient les trois jeunes gens dans la fournaise, et Jésus-Christ, au jardin des Oliviers, a aussi prié selon son inspiration. (Matth., XXVI). Il n’est pas nécessaire de se servir de mots étudiés : on parle à Dieu eu toute familiarité et confiance, le langage simple a toujours été celui du cœur. Dieu ne regarde pas les paroles, mais le cœur.

« Les hommes estiment le cœur d’après les paroles, mais Dieu pèse les paroles d'après le cœur. » (Saint Grégoire le Grand) — Il n ’est pas nécessaire non plus de prononcer beaucoup de paroles (Matth., VI, 7), Dieu ne regarde pas la longueur, mais la ferveur de la prière. La courte prière du bon larron n’a-t-elle pas été abondamment récompensée ?

On peut prier seul ou avec d’autres.

Jésus-Christ a recommandé ce double genre de prières, aussi bien la prière particulière (Matth., VI, 5) que la prière en commun. (Ibid., XVI, 19).

3. On peut prier dans l’intention de louer Dieu, de l’apaiser, de le supplier ou le remercier.


Nous louons Dieu à cause de ses perfections infinies. Quand on voyage dans des pays étrangers, on parle avec admiration et louange de la beauté de la nature ; or, qu’est-ce que la beauté du monde visible en comparaison de la magnificence de Dieu ? Oh! de quelle allégresse on serait transporté, de quelles acclamations on saluerait les grandeurs de Dieu, si l’on pouvait contempler sa beauté infinie ! Aussi les anges qui contemplent sans voile sa Majesté infinie le louent et le bénissent, en chantant : « Saint, saint, saint » (Is., VI, 3), comme ils ont chanté sur les montagnes de Bethléem les louanges du Sauveur nouveau-né. (Luc, II, 14). Comme les anges voient Dieu « face à face » et sont saisis d’admiration, leur prière devient un chant de louange. Chanter les louanges de Dieu, telle est donc l’occupation des habitants des cieux (Apoc., IV), et nous mêmes sur la terre, en reconnaissant la Majesté de Dieu par la création et la Révélation, nous sommes portés à louer Dieu.

L’ Église loue Dieu sans interruption. Le Gloria et le Sanctus à la messe, le Te Deum dans les grandes solennités, le Gloria Patri en l’honneur de la Sainte Trinité, la salutation chrétienne renferment tous la louange de Dieu. En glorifiant Dieu, nous commençons dès ici-bas l’occupation des habitants des cieux qui louent Dieu éternellement. (Tert.) La prière des trois jeunes gens dans la fournaise (Dan., III), le Magnificat de la Sainte Vierge étaient des cantiques de louanges. (Luc, I). — Dieu veut que nous lui demandions tout ce qui nous est nécessaire ; sans la prière, il ne donne rien. (Jac., IV, 2)

Celui qui ne demande pas ne reçoit rien (Sainte Thérèse). Dieu veut même que nous le priions avec instance, il veut non seulement que nous le priions, mais que nous lui fassions violence (Saint Grégoire le Grand). Dieu agit comme les Lacédémoniens qui plaçaient du pain sur une poutre élevée, afin qu’en essayant de l’atteindre avec leurs flèches leurs enfants, tourmentés par la faim, méritassent leur nourriture. Sans doute Dieu connaît tous nos besoins (Matth., VI, 32) et pourrait nous aider sans que nous le demandions ; mais il veut que nous l’implorions, afin que nous regardions ses dons non pas comme quelque chose qu’il nous doit, mais comme des bienfaits à notre égard, et que nous reconnaissions d’autant plus notre dépendance envers lui ; il veut donc nous rendre humbles et reconnaissants. Nous avons des exemples de supplication dans la prière de Jésus-Christ au jardin des Oliviers et sur la croix ; dans celle de saint Étienne mourant, des Apôtres dans la barque, des chrétiens priant pour saint Pierre en prison, de sainte Monique.
La supplication devient une prière de pénitence, quand nous demandons à Lieu le pardon de nos péchés. David et les Ninivites firent une prière de pénitence : celle de David, c'est le Miserere qui commence par ces mots : « Ayez pitié de moi, ô mon Dieu, selon votre grande miséricorde » (Ps. L) et qu'on chante entre autres aux funérailles. — Dieu exige que nous le remerciions pour chacun de ses bienfaits (1 Thess., V, 18) comme nous le voyons par les paroles de Jésus-Christ au lépreux guéri (Luc, XVIIl). La reconnaissance est le meilleur moyen d'obtenir de nouveaux bienfaits. La prière de Noé au sortir de l'arche fut une prière d'actions de grâces (Gen., VIII). Dieu retire souvent ses bienfaits aux hommes qui ne savent pas les apprécier et ne l’en remercient jamais ; il leur envoie souvent la détresse, la famine, les mauvaises récoltes, la grêle, etc.

François Spirago - Catéchisme catholique populaire