Bonne semaine sainte à tous. Vive Jésus, vive sa Croix !
dimanche 25 mars 2018
lundi 12 mars 2018
samedi 10 mars 2018
Existe-t-il un ordre naturel ?
Monsieur l'abbé Olivier Rioult répond à notre question « Existe-t-il un ordre naturel ? » (mars 2018).
lundi 5 mars 2018
Les rebaptisants, ou la validité du baptême des hérétiques
REBAPTISANTS
C’est le nom que l’on donnait à ceux qui prétendaient qu’il fallait rebaptiser les hérétiques : cette erreur fut d’abord soutenue par Agrippin, ensuite par saint Cyprien, et adoptée dans le quatrième siècle par les donatistes.
L’an 255, on commença à disputer en Afrique sur le baptême des hérétiques. Les novatiens rebaptisaient tous ceux qui passaient dans leur parti. Un nommé Magnus, croyant qu’il ne fallait avoir rien de commun avec les hérétiques, ou craignant qu’on ne parût suivre Novatien en rebaptisant comme lui, demanda à saint Cyprien s’il fallait rebaptiser ceux qui quittaient le parti de Novatien et rentraient dans l’Eglise.
Saint Cyprien répondit que, puisqu’il fallait rebaptiser tous ceux qui avaient été baptisés par des hérétiques ou schismatiques, les novatiens n’en devaient pas être exceptés ; il se fondait sur ces principes :
1° Ceux qui sortent hors de l’Eglise doivent être considérés comme des païens et, par conséquent, tout à fait incapables de faire les fonctions de ministres de Jésus-Christ.
2° L’Eglise étant unique et renfermée dans une seule communion, il fallait qu’elle fût du côté de Novatien ou de celui de Corneille.
3° Novatien ne pouvait pas donner le nom d’Eglise à son parti, parce qu’il était destitué de la succession des évêques, ayant été ordonné hors de l’Eglise.
4° Les hérétiques et les schismatiques étant destitués du Saint-Esprit, ils ne pouvaient pas le conférer à ceux qu’ils baptisaient, non plus que le pardon des péchés, qu’on ne pouvait accorder sans avoir le Saint-Esprit : qu’on ne peut se sauver hors de la vraie Eglise ; que par conséquent on n’avait point de vrai baptême hors de l’Eglise, et que Novatien ne pouvait regarder son parti comme la vraie Eglise, ou qu’il fallait dire que Corneille, le seul légitime successeur de Fabien, Corneille, qui avait remporté la couronne du martyre, était hors de l’Eglise ; enfin il prouve, par l’exemple des tribus schismatiques d’Israël, que Dieu hait les schismatiques ; qu’ainsi, ni les schismatiques, ni les hérétiques n’ont le Saint-Esprit.
Saint Cyprien dit, dans celle lettre, tout ce qu’on peut dire en faveur de son sentiment ; cependant elle ne leva pas toutes les difficultés des évêques de Numidie. Dix huit évêques de celte province écrivirent de nouveau à saint Cyprien, qui convoqua un concile dans lequel on déclara que personne ne pouvait être baptisé hors de l’Eglise.
Malgré la décision du concile d’Afrique , beaucoup d’évêques préféraient la coutume ancienne au sentiment de Cyprien, qui convoqua un nouveau concile, où les évêques de Numidie et d’Afrique se trouvèrent : ce second concile confirma la décision du premier concile de Carthage sur la nullité du baptême des hérétiques. Le concile informa le pape Etienne de ce qu’il avait jugé ; mais le souverain pontife condamna le jugement des Pères de Carthage.
La lettre de saint Etienne est perdue ; mais on voit, par celle de saint Cyprien. que ce pape insistait beaucoup sur la tradition et sur la pratique universelle de l’Eglise, dans laquelle il ne faut rien innover.
On mit de part et d’autre beaucoup de vivacité et de chaleur dans cette dispute. Saint Etienne menaça d’excommunier les rebaptisants ; mais il n’y eut point d’excommunication portée, du moins aucun de ceux qui l’ont prétendu n’ont jusqu’ici donné aucune preuve convaincante de leur sentiment ; car il y a bien de la différence entre l’excommunication et le refus que le pape Etienne fit de communiquer avec les députés d’Afrique, ou une menace de se séparer de saint Cypricn ; et ce sont cependant les deux preuves qu’on apporte pour établir que saint Etienne excommunia saint Cyprien.
Saint Cyprien de Carthage (210-258) |
L’an 255, on commença à disputer en Afrique sur le baptême des hérétiques. Les novatiens rebaptisaient tous ceux qui passaient dans leur parti. Un nommé Magnus, croyant qu’il ne fallait avoir rien de commun avec les hérétiques, ou craignant qu’on ne parût suivre Novatien en rebaptisant comme lui, demanda à saint Cyprien s’il fallait rebaptiser ceux qui quittaient le parti de Novatien et rentraient dans l’Eglise.
Saint Cyprien répondit que, puisqu’il fallait rebaptiser tous ceux qui avaient été baptisés par des hérétiques ou schismatiques, les novatiens n’en devaient pas être exceptés ; il se fondait sur ces principes :
1° Ceux qui sortent hors de l’Eglise doivent être considérés comme des païens et, par conséquent, tout à fait incapables de faire les fonctions de ministres de Jésus-Christ.
2° L’Eglise étant unique et renfermée dans une seule communion, il fallait qu’elle fût du côté de Novatien ou de celui de Corneille.
3° Novatien ne pouvait pas donner le nom d’Eglise à son parti, parce qu’il était destitué de la succession des évêques, ayant été ordonné hors de l’Eglise.
4° Les hérétiques et les schismatiques étant destitués du Saint-Esprit, ils ne pouvaient pas le conférer à ceux qu’ils baptisaient, non plus que le pardon des péchés, qu’on ne pouvait accorder sans avoir le Saint-Esprit : qu’on ne peut se sauver hors de la vraie Eglise ; que par conséquent on n’avait point de vrai baptême hors de l’Eglise, et que Novatien ne pouvait regarder son parti comme la vraie Eglise, ou qu’il fallait dire que Corneille, le seul légitime successeur de Fabien, Corneille, qui avait remporté la couronne du martyre, était hors de l’Eglise ; enfin il prouve, par l’exemple des tribus schismatiques d’Israël, que Dieu hait les schismatiques ; qu’ainsi, ni les schismatiques, ni les hérétiques n’ont le Saint-Esprit.
Saint Cyprien dit, dans celle lettre, tout ce qu’on peut dire en faveur de son sentiment ; cependant elle ne leva pas toutes les difficultés des évêques de Numidie. Dix huit évêques de celte province écrivirent de nouveau à saint Cyprien, qui convoqua un concile dans lequel on déclara que personne ne pouvait être baptisé hors de l’Eglise.
Malgré la décision du concile d’Afrique , beaucoup d’évêques préféraient la coutume ancienne au sentiment de Cyprien, qui convoqua un nouveau concile, où les évêques de Numidie et d’Afrique se trouvèrent : ce second concile confirma la décision du premier concile de Carthage sur la nullité du baptême des hérétiques. Le concile informa le pape Etienne de ce qu’il avait jugé ; mais le souverain pontife condamna le jugement des Pères de Carthage.
La lettre de saint Etienne est perdue ; mais on voit, par celle de saint Cyprien. que ce pape insistait beaucoup sur la tradition et sur la pratique universelle de l’Eglise, dans laquelle il ne faut rien innover.
Or, si telle est l’opinion des Donatistes, qu’ils s’en fassent à eux-mêmes l’application immédiate, car tout séparés qu’ils soient de la communion de l’Eglise, ils reçoivent cependant le véritable baptême de Jésus-Christ, dont la sainteté est absolument indépendante des dispositions du ministre.
-Saint Augustin, in Du baptême contre les donatistes.
Saint Cyprien , pour se soutenir contre l’autorité du siège de Rome, convoqua un troisième concile, composé de quatre-vingt-sept évêques africains, numides et maures : on y confirma le jugement des deux conciles précédents sur la nullité du baptême des hérétiques. Saint Cyprien écrivit à Firmilien, sur la contestation qui s’était élevée entre le pape et l’Eglise d’Afrique, et Firmilien approuva le sentiment de saint Cyprien.
Saint Augustin. |
Le pape Etienne mourut, et Sixte, son successeur, ne poussa pas plus loin la contestation de la validité du baptême des hérétiques, qui fut décidée conformément au jugement du pape Etienne dans un concile plénier. Nous n’examinerons point si ce concile est le concile de Nicée ou celui d’Arles ; cette question n’est d’aucune importance, puisque par l’un et par l’autre concile il est certain que le baptême des hérétiques est valide.
Saint Cyprien n’appuyait son opinion que sur des paralogismes : il prétendait que l’hérétique n’ayant ni le Saint-Esprit , ni la grâce, il ne pouvait la donner ; mais il est certain que le baptême ne tirant son efficacité que de l’institution de Jésus-Christ, la foi du ministre ne peut empêcher l’effet du baptême, pas plus que l’état de péché dans lequel il se trouverait en donnant le baptême.
Ce qu’il disait que personne ne pouvant se sauver hors de la vraie Eglise , il ne pouvait y avoir de baptême chez les hérétiques, est encore un paralogisme ; car, comme on ne sort de la vraie Eglise que par l’hérésie, c’est-à-dire par la révolte à l’autorité de la vraie Eglise, dans les sociétés chrétiennes il
n’y a d’hérétiques que ceux qui participent à cet esprit de révolte ; ceux qui n’y participent pas appartiennent à la vraie Eglise : tels sont les enfants et les adultes qui sont dans une ignorance invincible de la révolte de la société dans laquelle ils vivent.
Enfin, le pape Etienne opposait à saint Cyprien une tradition universelle et immémoriale, et saint Cyprien reconnaît, dans sa lettre à Quintus, la vérité de cette tradition ; il ne remonte pas lui-même au delà d’Agrippin, son prédécesseur.
Mais, dira-l on, comment donc l’usage de rebaptiser les hérétiques s’était-il établi ? Le voici :
Il s’était élevé dans l’Eglise des hérétiques qui avaient altéré la forme du baptême, tels que les valentiniens, les basilidiens, etc. Le baptême de ces hérétiques était nul, et on rebaptisait ceux qui se convertissaient lorsqu’ils avaient été baptisés par ces hérétiques, ce qui n’est point du tout favorable au sentiment de saint Cyprien.
Les donatistes adoptèrent ce sentiment, et saint Augustin l’a très-bien réfuté dans son livre du baptême.
-Abbé Pluquet, Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes. Edition Jérôme Millon. 2017. (Publié pour la première fois en 1762, revu et corrigé par l'abbé Claris en 1847 puis publié par l'abbé Migne la même année). Pp. 598-600.
-Abbé Pluquet, Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes. Edition Jérôme Millon. 2017. (Publié pour la première fois en 1762, revu et corrigé par l'abbé Claris en 1847 puis publié par l'abbé Migne la même année). Pp. 598-600.
vendredi 2 mars 2018
L'hérésie de Donat, communément nommée le donatisme
DONATISTES, schismatiques qui se séparèrent :
l°de la communion de Cécilien,
parce qu'il avait été ordonné par Félix d'Aptunge, qu'ils prétendaient avoir livré les vases
de l'église et les livres sacrés pendant la
persécution;
2° de toute l'Eglise parce que toute l'Eglise était restée unie de communion avec Cécilien ; et non pas avec Majorin et avec Donat, successeur de Majorin.
Ce schisme produit par une petite vengeance particulière, troubla l'Eglise pendant plus d'un siècle, remplit l'Afrique de calamités et d'horreurs, épuisa la rigueur et la patience de trois empereurs et ne céda qu'au temps, semblable à ces volcans que le mineur imprudent allume et qui ne s'éteignent que lorsque le feu a consumé le soufre et le bitume qu'ils renfermaient dans leurs entrailles.
Des erreurs des donatistes.
Le schisme naît presque toujours de l'erreur, ou il la produit. Les donatistes s'étaient séparés de l'Église parce qu'ils prétendaient que l'ordination de Cécilien était nulle, attendu qu'il avait été ordonné par Félix, évêque d'Aptunge qui était traditeur ; ils furent donc conduits naturellement à nier la validité des sacrements donnés par les hérétiques et par les pécheurs.
De ce que les sacrements donnés par les pécheurs étaient nuls, il s'ensuivait que l'Eglise était composée de justes ; que, par conséquent, Cécilien, Félix d'Aptunge qui l'avait ordonné, le pape Miltiade qui l'avait absous et plusieurs de ses confrères ayant été convaincus de crimes, devaient être déposés et chassés de l'Eglise; que leurs crimes les avaient fait cesser d'être les membres de l'Eglise ; que tous ceux qui les avaient soutenus et qui avaient communiqué avec eux s'étaient rendus complices de leurs crimes en les approuvant, et qu'ainsi, non seulement l'Eglise d'Afrique, mais aussi toutes les Eglises du monde qui s'étaient liées de communion avec les Eglises du parti de Cécilien ayant été souillées elles avaient cessé de faire partie de la véritable Eglise de Jésus-Christ, laquelle avait été réduite au petit nombre de ceux qui n'avaient point voulu avoir de part avec les prévaricateurs et qui s'étaient conservés dans la pureté.
Ils croyaient donc que l'Eglise n'était composée que de justes et qu'ils étaient cette Eglise.
Toute la dispute des catholiques et des donatistes se réduisait donc à trois questions :
1°si Félix était coupable des crimes qu'on lui imputait ;
2° si, en supposant qu'il en fût coupable, il avait pu ordonner validement Cécilien ;
3° si l'Eglise n'était composée que de justes et de saints, ou si elle était composée de bons et de méchants.
On a vu dans l'histoire du schisme des donatistes, qu'ils n'avaient jamais prouvé, contre Félix et contre Cécilien, aucun des crimes dont ils les accusaient. Je fais voir dans l'article REBAPTISANTS que les sacrements donnés par les hérétiques et par les pécheurs sont valides ; je vais examiner l'erreur des donatistes sur l'Eglise.
Les donatistes prétendaient que l'Eglise n'était composée que de justes, et ils le prouvaient par les caractères que lui donnent les prophètes et par les images sous lesquelles ils l'annoncent.
Isaïe nous la représente, disaient-ils, comme une ville sainte dans laquelle aucun impur ou incirconcis ne doit être admis ; elle doit contenir un peuple saint (1).
Le Cantique des Cantiques nous la peint sous l'emblème d'une femme sans défaut et dans laquelle il n'y a rien à reprendre (2).
Le Nouveau Testament était encore plus clair et plus précis selon les donatistes : saint Paul dit expressément que Jésus-Christ a aimé son Eglise, qu'il l'a sanctifiée,qu'elle est pure et sans tache (3).
Ils prétendaient que la vraie Eglise était composée d'un petit nombre de justes ; que la grande étendue n'était point essentielle à la vraie Eglise ; qu'elle avait été renfermée dans Abraham, Isaac et Jacob ; qu'elle était désignée dans l'Ecriture sous l'emblème d'une porte étroite, par laquelle peu de monde entrait, etc. (4). Ils justifiaient leur schisme par l'exemple d'Elie, d'Elisée, qui n'avaient point communiqué avec les samaritains ; ils s'appuyaient sur ce que Dieu dit, par la bouche d'Aggée, qu'il déteste une nation souillée par le péché, et que tout ce qu'elle offre est souillé (5).
Les catholiques firent voir que les donatistes étaient dans l'erreur sur la nature et sur l'étendue de l'Eglise. On prouva aux donatistes que l'Eglise était représentée dans l'Ecriture comme une société qui renfermait les bons et les méchants ; que Jésus-Christ l'avait lui-même représentée sous ces traits.
Tantôt c'est un filet jeté dans la mer et qui renferme toutes sortes de poissons ; tantôt c'est un champ où l'homme ennemi a semé de l'ivraie d'autres fois c'est une aire qui renferme de la paille mêlée avec le bon grain (6).
L'ancienne Eglise renfermait les pécheurs dans son sein : Aaron et Moïse ne firent point de schisme et cependant l'Eglise d’Israël contenait des sacrilèges : Saul et David appartenaient à l'Eglise de Juda ; il y avait de mauvais prêtres et de mauvais Juifs dans l'Eglise judaïque et dans la même société dont Jérémie, Isaïe, Daniel, Ézéchiel étaient membres (7).
Saint Jean ne se sépara point de la communion des pécheurs ; il les regarda comme étant dans l'Eglise malgré leurs péchés : c'est l'idée que saint Paul nous donne de l'Eglise, et le culte, les prières, les cérémonies aussi anciennes que l'Eglise même, supposent qu'elle renferme des pécheurs (8).
Tous les endroits dans lesquels l'Eglise nous est représentée comme une société pure dont les pécheurs sont exclus doivent s'entendre de l'Eglise triomphante, selon saint Augustin (9). Sur la terre elle est une société religieuse ; composée d'hommes unis extérieurement par la communion des mêmes sacrements, par la soumission aux pasteurs légitimes, et unis intérieurement par la foi, l'espérance et la charité. On peut donc. distinguer dans l'Eglise une partie extérieure et visible, qui est comme le corps de l'Eglise, et une partie intérieure invisible, qui est comme l'âme de l'Eglise.
Ainsi, si l'on ne considère que la partie intérieure de l'Eglise, on peut dire que les hérétiques et les pécheurs n'appartiennent point à l'Eglise ; mais il n'est pas moins vrai qu'ils appartiennent au corps de l'Eglise [NDLR : au corps mystique de Jésus-Christ], et c'est ainsi qu'il fallait expliquer les différents endroits dans lesquels saint Augustin, et après lui plusieurs théologiens, disent que les pécheurs ne sont point membres de l'Eglise.
Le cardinal Bellarmin a donné la solution de toutes ces difficultés par la comparaison de l'homme, qui est composé d'un corps et d'une âme, et dont un bras ne laisse pas d'être partie, quoiqu'il soit paralytique.
Les catholiques ne prouvaient pas avec moins de force et d'évidence qu'une société renfermée dans une partie de l'Eglise de l'Afrique ne pouvait être ta vraie Eglise.
Tous les prophètes nous annoncent que l'Eglise de Jésus-Christ doit se répandre par toute la terre (10).
Jésus-Christ s'applique lui-même toutes ces prophéties ; il dit qu'il fallait que le Christ souffrit et qu'on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem (11).
Tous les Pères ,avant les donatistes, avaient pensé que l'Eglise de Jésus-Christ, la vraie Eglise, devait être catholique ; c'était par ce nom que, depuis saint Polycarpe, on la distinguait des sectes qui s'étaient élevées dans le christianisme (12).
Enfin, c'était la doctrine de toute l'Eglise contre les donatistes (13).
Il n'est donc jamais permis de se séparer de l'Eglise catholique, puisqu'elle est la vraie Eglise : on peut toujours s'y sauver ; on n'a, par conséquent, jamais de juste sujet de rompre avec elle le lien de la communion, et toutes les sociétés qui s'en séparent sont schismatiques.
Avant les disputes que Luther, Zuingle et Calvin excitèrent dans l'Occident, l'Eglise romaine était incontestablement l'Eglise catholique, et tous ceux qui ont embrassé la réforme étaient dans sa communion : ils n'ont donc pu s'en séparer sans être schismatiques car ils ne peuvent reprocher à l'Eglise catholique de soutenir un seul dogme qui n'ait été soutenu par de grands saints ; par conséquent, on a pu dans tous les temps faire son salut dans l'Eglise romaine : il n'y avait donc, au temps de Luther, de Zuingle, de Calvin, aucune raison légitime de se séparer de l'Eglise romaine, comme les chefs de la prétendue réforme l'ont fait.
L'Eglise réformée n'est donc pas la vraie Eglise, et ceux qui ont embrassé sa communion n'ont aucune raison pour rester séparés de l'Eglise romaine. Voilà ce que le clergé de France, à la fin du siècle passé, exhortait les prétendus réformés à examiner, et c'est ce que tous les catholiques devraient encore aujourd'hui les engager à examiner sans passion ; je ne doute pas que cette méthode, proposée si sagement par le clergé, ne réunit beaucoup de protestants à l'Eglise catholique.
Mais il est bien difficile que cette méthode réussisse s'ils haïssent les catholiques et s'ils sont irrités contre eux, s'ils croient qu'on veut les tyranniser et non pas les éclairer. La question du schisme des protestants a été épuisée par M. Nicole, dans l'excellent ouvrage intitulé : Les prétendus réformés convaincus de schisme.
-Abbé Pluquet, Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes. Edition Jérôme Millon. 2017. (Publié pour la première fois en 1762, revu et corrigé par l'abbé Claris en 1847 puis publié par l'abbé Migne la même année). Pp. 204, 209-211
Saint Augustin débattant avec les donatistes (représentation du 18eme siècle). |
2° de toute l'Eglise parce que toute l'Eglise était restée unie de communion avec Cécilien ; et non pas avec Majorin et avec Donat, successeur de Majorin.
Ce schisme produit par une petite vengeance particulière, troubla l'Eglise pendant plus d'un siècle, remplit l'Afrique de calamités et d'horreurs, épuisa la rigueur et la patience de trois empereurs et ne céda qu'au temps, semblable à ces volcans que le mineur imprudent allume et qui ne s'éteignent que lorsque le feu a consumé le soufre et le bitume qu'ils renfermaient dans leurs entrailles.
Des erreurs des donatistes.
Le schisme naît presque toujours de l'erreur, ou il la produit. Les donatistes s'étaient séparés de l'Église parce qu'ils prétendaient que l'ordination de Cécilien était nulle, attendu qu'il avait été ordonné par Félix, évêque d'Aptunge qui était traditeur ; ils furent donc conduits naturellement à nier la validité des sacrements donnés par les hérétiques et par les pécheurs.
De ce que les sacrements donnés par les pécheurs étaient nuls, il s'ensuivait que l'Eglise était composée de justes ; que, par conséquent, Cécilien, Félix d'Aptunge qui l'avait ordonné, le pape Miltiade qui l'avait absous et plusieurs de ses confrères ayant été convaincus de crimes, devaient être déposés et chassés de l'Eglise; que leurs crimes les avaient fait cesser d'être les membres de l'Eglise ; que tous ceux qui les avaient soutenus et qui avaient communiqué avec eux s'étaient rendus complices de leurs crimes en les approuvant, et qu'ainsi, non seulement l'Eglise d'Afrique, mais aussi toutes les Eglises du monde qui s'étaient liées de communion avec les Eglises du parti de Cécilien ayant été souillées elles avaient cessé de faire partie de la véritable Eglise de Jésus-Christ, laquelle avait été réduite au petit nombre de ceux qui n'avaient point voulu avoir de part avec les prévaricateurs et qui s'étaient conservés dans la pureté.
Ils croyaient donc que l'Eglise n'était composée que de justes et qu'ils étaient cette Eglise.
Toute la dispute des catholiques et des donatistes se réduisait donc à trois questions :
1°si Félix était coupable des crimes qu'on lui imputait ;
2° si, en supposant qu'il en fût coupable, il avait pu ordonner validement Cécilien ;
3° si l'Eglise n'était composée que de justes et de saints, ou si elle était composée de bons et de méchants.
Le pape saint Miltiade. |
Les donatistes prétendaient que l'Eglise n'était composée que de justes, et ils le prouvaient par les caractères que lui donnent les prophètes et par les images sous lesquelles ils l'annoncent.
Isaïe nous la représente, disaient-ils, comme une ville sainte dans laquelle aucun impur ou incirconcis ne doit être admis ; elle doit contenir un peuple saint (1).
Le Cantique des Cantiques nous la peint sous l'emblème d'une femme sans défaut et dans laquelle il n'y a rien à reprendre (2).
Le Nouveau Testament était encore plus clair et plus précis selon les donatistes : saint Paul dit expressément que Jésus-Christ a aimé son Eglise, qu'il l'a sanctifiée,qu'elle est pure et sans tache (3).
Ils prétendaient que la vraie Eglise était composée d'un petit nombre de justes ; que la grande étendue n'était point essentielle à la vraie Eglise ; qu'elle avait été renfermée dans Abraham, Isaac et Jacob ; qu'elle était désignée dans l'Ecriture sous l'emblème d'une porte étroite, par laquelle peu de monde entrait, etc. (4). Ils justifiaient leur schisme par l'exemple d'Elie, d'Elisée, qui n'avaient point communiqué avec les samaritains ; ils s'appuyaient sur ce que Dieu dit, par la bouche d'Aggée, qu'il déteste une nation souillée par le péché, et que tout ce qu'elle offre est souillé (5).
Les catholiques firent voir que les donatistes étaient dans l'erreur sur la nature et sur l'étendue de l'Eglise. On prouva aux donatistes que l'Eglise était représentée dans l'Ecriture comme une société qui renfermait les bons et les méchants ; que Jésus-Christ l'avait lui-même représentée sous ces traits.
Tantôt c'est un filet jeté dans la mer et qui renferme toutes sortes de poissons ; tantôt c'est un champ où l'homme ennemi a semé de l'ivraie d'autres fois c'est une aire qui renferme de la paille mêlée avec le bon grain (6).
L'ancienne Eglise renfermait les pécheurs dans son sein : Aaron et Moïse ne firent point de schisme et cependant l'Eglise d’Israël contenait des sacrilèges : Saul et David appartenaient à l'Eglise de Juda ; il y avait de mauvais prêtres et de mauvais Juifs dans l'Eglise judaïque et dans la même société dont Jérémie, Isaïe, Daniel, Ézéchiel étaient membres (7).
Saint Jean ne se sépara point de la communion des pécheurs ; il les regarda comme étant dans l'Eglise malgré leurs péchés : c'est l'idée que saint Paul nous donne de l'Eglise, et le culte, les prières, les cérémonies aussi anciennes que l'Eglise même, supposent qu'elle renferme des pécheurs (8).
Tous les endroits dans lesquels l'Eglise nous est représentée comme une société pure dont les pécheurs sont exclus doivent s'entendre de l'Eglise triomphante, selon saint Augustin (9). Sur la terre elle est une société religieuse ; composée d'hommes unis extérieurement par la communion des mêmes sacrements, par la soumission aux pasteurs légitimes, et unis intérieurement par la foi, l'espérance et la charité. On peut donc. distinguer dans l'Eglise une partie extérieure et visible, qui est comme le corps de l'Eglise, et une partie intérieure invisible, qui est comme l'âme de l'Eglise.
Ainsi, si l'on ne considère que la partie intérieure de l'Eglise, on peut dire que les hérétiques et les pécheurs n'appartiennent point à l'Eglise ; mais il n'est pas moins vrai qu'ils appartiennent au corps de l'Eglise [NDLR : au corps mystique de Jésus-Christ], et c'est ainsi qu'il fallait expliquer les différents endroits dans lesquels saint Augustin, et après lui plusieurs théologiens, disent que les pécheurs ne sont point membres de l'Eglise.
Le cardinal Bellarmin a donné la solution de toutes ces difficultés par la comparaison de l'homme, qui est composé d'un corps et d'une âme, et dont un bras ne laisse pas d'être partie, quoiqu'il soit paralytique.
Les catholiques ne prouvaient pas avec moins de force et d'évidence qu'une société renfermée dans une partie de l'Eglise de l'Afrique ne pouvait être ta vraie Eglise.
Tous les prophètes nous annoncent que l'Eglise de Jésus-Christ doit se répandre par toute la terre (10).
Jésus-Christ s'applique lui-même toutes ces prophéties ; il dit qu'il fallait que le Christ souffrit et qu'on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem (11).
Tous les Pères ,avant les donatistes, avaient pensé que l'Eglise de Jésus-Christ, la vraie Eglise, devait être catholique ; c'était par ce nom que, depuis saint Polycarpe, on la distinguait des sectes qui s'étaient élevées dans le christianisme (12).
Enfin, c'était la doctrine de toute l'Eglise contre les donatistes (13).
Il n'est donc jamais permis de se séparer de l'Eglise catholique, puisqu'elle est la vraie Eglise : on peut toujours s'y sauver ; on n'a, par conséquent, jamais de juste sujet de rompre avec elle le lien de la communion, et toutes les sociétés qui s'en séparent sont schismatiques.
Avant les disputes que Luther, Zuingle et Calvin excitèrent dans l'Occident, l'Eglise romaine était incontestablement l'Eglise catholique, et tous ceux qui ont embrassé la réforme étaient dans sa communion : ils n'ont donc pu s'en séparer sans être schismatiques car ils ne peuvent reprocher à l'Eglise catholique de soutenir un seul dogme qui n'ait été soutenu par de grands saints ; par conséquent, on a pu dans tous les temps faire son salut dans l'Eglise romaine : il n'y avait donc, au temps de Luther, de Zuingle, de Calvin, aucune raison légitime de se séparer de l'Eglise romaine, comme les chefs de la prétendue réforme l'ont fait.
L'Eglise réformée n'est donc pas la vraie Eglise, et ceux qui ont embrassé sa communion n'ont aucune raison pour rester séparés de l'Eglise romaine. Voilà ce que le clergé de France, à la fin du siècle passé, exhortait les prétendus réformés à examiner, et c'est ce que tous les catholiques devraient encore aujourd'hui les engager à examiner sans passion ; je ne doute pas que cette méthode, proposée si sagement par le clergé, ne réunit beaucoup de protestants à l'Eglise catholique.
Mais il est bien difficile que cette méthode réussisse s'ils haïssent les catholiques et s'ils sont irrités contre eux, s'ils croient qu'on veut les tyranniser et non pas les éclairer. La question du schisme des protestants a été épuisée par M. Nicole, dans l'excellent ouvrage intitulé : Les prétendus réformés convaincus de schisme.
-Abbé Pluquet, Dictionnaire des hérésies, des erreurs et des schismes. Edition Jérôme Millon. 2017. (Publié pour la première fois en 1762, revu et corrigé par l'abbé Claris en 1847 puis publié par l'abbé Migne la même année). Pp. 204, 209-211