lundi 14 novembre 2016

Da Vinci code contre la foi catholique

« L’ignorance est notre pire ennemi », S. Pie X, pape (1903-1914)

Une arme sournoise

Un style

L’histoire est présentée comme une banale fiction. Mais, en prétendant l’étayer sur des faits, des personnes et des lieux réels, l’auteur lui donne, peu à peu, le caractère d’un documentaire. Au final, nous sommes en présence d’un méchant pamphlet anti-chrétien. Son habileté naît d’une subtile confusion entre fiction et réalité.

« Dans mon livre, je révèle un secret qui est murmuré depuis des siècles. Je ne l’ai pas inventé. C’est la première fois que ce secret est dévoilé dans un thriller à succès. J’espère sincèrement que Da Vinci codeservira à ouvrir aux lecteurs de nouvelles pistes de réflexion.» (Site internet de l’auteur: www.danbrown.com).

Cette ambiguïté instrumentale entend placer de très graves accusations, « nouvelles pistes de réflexion », au-delà du vrai et du faux, du bien et du mal. Une haine décomplexée du Christ et de l’Église se couvre ainsi des habits de l’immunité.

Un contexte

Cette fable perfide profite du contexte d’inculture historique, d’ignorance religieuse et de méconnaissance de l’Évangile. Vatican II a été l’occasion d’une rupture avec l’histoire et la tradition de l’Église. Des clercs et des fidèles en nombre, privés de racines, sont maintenant livrés au désarroi.

Alors, falsifier lieux et acteurs de l’Histoire, argumenter sans preuves, utiliser la mode pseudo-scientifique,s’accaparer de puériles légendes ésotérico-gnostiques est un jeu malhonnête, mais facile au royaume de l’ignorance. Il prépare de rapides et incalculables ravages spirituels, scientifiques et culturels.

Un but

Le Da Vinci code s’inspire de récentes et fantaisistes élucubrations gnostiques, ésotériques, féministes, new-age et kabbalistiques. Une malice consommée les arrange avec de vieilles fables antichrétiennes, des légendes apocryphes et des délires païens.

Il accuse la foi catholique d’avoir manipulé l’Histoire, après avoir détruit les documents concernant « un Christ véritable ».

En fait, son but ultime est la perte des chrétiens par la ruine de la religion catholique.


Contrefaçons historiques à l’assaut de la foi catholique

« Une grande partie de ce que l’Église nous a enseigné, affirme Dan Brown (Da Vinci code, Lattès, p. 294) – et nous enseigne encore – sur Jésus est tout simplement faux. ». Il entonne là un refrain ânonné depuis longtemps par les sectes, dont plus récemment les Témoins de Jéhovah, et par l’Islam. Il fallait décrédibiliser l’Église pour promouvoir une nouvelle version des faits. Les sources et le but de ce « roman historique » s’attaquent ainsi fondamentalement à la théologie du Verbe incarné, le Christ. Sa trame s’articule donc essentiellement autour d’une thèse sur Notre-Seigneur Jésus-Christ. Il n’aurait été qu’un simple homme mortel (p. 291), certainement un grand prophète, mais en aucun cas Dieu. Il aurait marié Marie-Madeleine, son principal disciple, dont le sein, « le saint Graal », aurait porté Sarah, fruit de ce mariage. Et les rois de France descendraient de cette union.


Avant-propos, propos trompeurs

« Toutes les descriptions de monuments, d’œuvres d’art, de documents et de rituels secrets évoqués sont avérées » (p. 9). Dès l’avant- propos, le lecteur est abusé.

La « Cène de Vinci », vue avec les yeux de la méthode Coué selon Dan Brown, remplace saint Jean par sainte Marie-Madeleine. Or la tradition picturale représente toujours saint Jean ainsi, à la droite du Christ. S’il n’y a pas de calice, sur la toile devant le Christ, ce n’est pas parce que Marie-Madeleine est le saint Graal. Mais Vinci peint l’heure, avant l’institution de l’eucharistie, où le Christ dévoile la trahison de Juda.


Le Prieuré de Sion, « – une société secrète européenne fondée en 1099 – est une organisation réellement existante. En 1975, la Bibliothèque Nationale de Paris a découvert des parchemins connus sous le nom de Dossiers Secrets, identifiant plusieurs membres du prieuré de Sion, dont Sir Isaac Newton, Botticelli, Victor Hugo et Léonard de Vinci» (p. 9). Pourtant, il n’a jamais été qu’une association créée en 1956 par « Sa Majesté druidique », Pierre Plantard, escroc antisémite. Pour forger la légende, il commanda, en 1967, la confection de faux documents qu’il fit déposer à la Bibliothèque Nationale.

L’église S. Sulpice à Paris n’a aucun lien avec le « Prieuré de Sion », rien d’ésotérique, ni de païen. Fiction ou réalité, Dan Brown joue sur la crédulité. L’obélisque et la bande de laiton qui traverse l’église ne sont pas des traces secrètes, mais appartiennent à un instrument scientifique du 18ème siècle. Les lettres « P » et « S », au coeur d’un vitrail, ne sont pas les initiales d’un « Prieuré de Sion », mais celles des saints patrons de cette église : Pierre et Sulpice.

Le méridien de Paris, dont se sert Dan Brown dans ses théories, ne traverse pas le Louvre là où le Da Vinci code l’indique. Il ne passe pas non plus par l’église Saint Sulpice.

Les limites de l’érudition de M. Brown sont frappantes, spécialement lorsqu’elles ridiculisent le cœur de sa pseudo-démonstration du mariage de Jésus et de Marie-Madeleine. M. Durson, universitaire américain, relate que « dans le Da Vinci code, Teabing affirme que tout érudit de l’araméen nous dirait que compagne signifie épouse. En réalité, le document cité a été écrit en copte, pas en araméen, et le mot employé pour compagne est un emprunt du grec qui signifie probablement soeur spirituelle. Pour épouse, on aurait employé le mot grec gynè".

La vérité contre les mensonges

Le mariage entre le Christ et la Madeleine, imaginé par ce roman à prétention documentaire, est essentiellement issu d’une tendance moderne à érotiser toutes les relations humaines. La mentalité contemporaine ne supporte pas la chasteté chrétienne que seule la grâce de Dieu rend vraiment possible. Et elle ne cesse de lutter contre le célibat religieux. Les baisers (p. 276) sur la bouche, évoqués dans l’évangile apocryphe de Philippe étaient pratiqués dans les communautés gnostiques. Cette pratique n’aurait rien de sexuel. En effet, on retrouve ce geste avec Jacques dans la 2nde apocalypse de Jacques. Elle symboliserait la communication de l’esprit à l’initié. Mais le baiser était aussi un usage spirituel de l’antiquité chrétienne. Rien n’établit une quelconque relation intime entre le Christ et la Madeleine. La seule épouse connue du Christ est son Église, comme Yahvé pouvait être l’époux d’Israël avant la venue du Messie.

La femme, selon le Da Vinci code, serait méprisée et discriminée dans l’Église depuis le début. Dan Brown laisse entendre que le Christ aurait désigné la Madeleine comme tête de l’Église. Les apôtres auraient ensuite fomenté une conspiration machiste pour usurper la place de Marie-Madeleine.

Cette manœuvre justifierait une attitude supposée discriminatoire de l’Église contre la femme.

Or Marie, conçue sans péché et mère de Dieu, Marie-Madeleine, pécheresse repentante et bien d’autres
« In hoc signo Vinces » Par ce signe tu vaincras
saintes femmes, sont au coeur de la foi catholique. Il est vrai que les protestants ont exclu le mystère féminin dans leur religion.

L’Église fut la première société dans l’histoire de l’humanité à reconnaître, à enseigner et à rétablir l’égale dignité des sexes. La civilisation chrétienne a ensuite libéré la femme des mœurs païennes antiques.

Le Nouveau Testament n’est pour Brown qu’une contrefaçon de l’empereur Constantin. « La Bible, telle que nous la connaissons aujourd’hui, a été collationnée par un païen, l’empereur Constantin le Grand » (p. 289), pour soutenir, à partir du 4ème siècle, la divinité de Jésus-Christ. Ainsi aurait-il « commandé et financé la rédaction d’un Nouveau Testament qui excluait tous les évangiles évoquant les aspects humains de Jésus » (p. 293).

Or les 27 livres qui le composent sont tous scientifiquement datés du 1er siècle (50-100). Dieu sait si la critique de leur authenticité fut âpre. Aucune autre religion n’est capable de présenter ses sources de manière aussi précise et certaine.

Le Canon de Muratori, daté de 170, donne une liste de ces textes. Elle a très probablement été arrêtée dès 130. En outre, chaque document et fragment du Nouveau Testament antérieur au 4ème s. détruit le château de cartes du Da Vinci code. Le Nouveau Testament fut divinement inspiré aux écrivains sacrés. Il relate les prédications du Christ et de ses apôtres. Il raconte la vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ et des premiers chrétiens. Il annonce surtout, avec la tradition de l’Église, le message évangélique. Son enseignement permet aux chrétiens de s’unir à Dieu en devenant meilleurs.

C’est une claire exposition de la véracité des natures humaine et divine du Christ. Ses « aspects humains», dont le Da Vinci code dit qu’ils sont occultés, apparaissent manifestement dans les évangiles. Ils rapportent son enfance et sa vie, son obéissance et sa colère, sa faim et sa soif, sa joie et sa tristesse, son amour et ses souffrances, sa passion et sa mort.

Ces « aspects » sont, en revanche, systématiquement gommés des écrits apocryphes gnostiques, dont se sert le Da Vinci code contre la foi catholique.

La lourdeur de ces apocryphes légendaires et leurs contradictions internes les rendent peu fiables. Ils s’emparent souvent de bribes du Nouveau Testament, preuve supplémentaire de leur rédaction tardive.

L’évangile de Philippe, cité plus haut, date de la moitié du 3ème siècle. Comme nombre de ces textes, il est issu de la gnose. Saint Irénée, saint Hyppolite et Tertullien, aux 2ème et 3ème siècles argumentèrent efficacement contre ces légendes.

La gnose est une nébuleuse, ses croyances sont très éclectiques. On peut la comparer au new age contemporain. Elle rejette généralement la nature humaine du Christ et prétend pouvoir initier à une connaissance secrète du vrai Dieu.

La divinité du Christ rejetée

Selon Brown, l’empereur Constantin aurait en 325, lors d’« un vote très serré », obtenu du Concile de Nicée la définition de la divinité du Christ (p. 291). Constantin n’a pas instrumentalisé ce concile, mais lui a permis de se tenir. Son soutien conforta l’autorité de l’Église et fit cesser la controverse arienne. Arius soutenait que Jésus-Christ était un dieu inférieur au Père.

Pour répondre aux hérésies, le concile formula plus précisément l’objet de la foi dans un Credo. Seuls 2 évêques sur environ 250 s’y opposèrent. Est-ce le résultat « d’un vote très serré »? Jésus-Christ, fils de Dieu est bien « engendré, non pas créé, de même nature que le Père » (Credo de Nicée).

L’Église, fondée par le Christ, professe depuis toujours la foi en un Dieu trinitaire : Père, Fils et Saint-Esprit, un seul Dieu en trois personnes.

Seuls les chrétiens croient en Dieu fait homme pour racheter les péchés du monde. Le Christ a été crucifié pour avoir révélé sa divinité, les apôtres ont été martyrisés pour en avoir témoigné. De nombreux chrétiens ont fait de même.

Les évangiles (Io 8, 58; Mc 14, 61-62; Io 20,31; etc.) rapportent cette révélation de la bouche même du Christ et par les miracles. S. Paul (1 Cor. 8, 16 ; Col 1, 15-16) l’enseigne au milieu du 1er siècle.

En 112, Pline le jeune, gouverneur romain de Bithynie, écrit que les chrétiens interrogés « affirmaient que toute leur faute, ou leur erreur, s’était bornée à avoir l’habitude de se réunir à jour fixe avant le lever du soleil, de chanter entre eux alternativement un hymne pour honorer le Christ comme Dieu… » (L. 10, l. 96).

Bien avant le concile de Nicée, Ignace d’Antioche +117, Justin +165, Irénée +200, Clément d’Alexandrie +215, Tertullien +225, et bien d’autres Pères confessent très explicitement dans leurs écrits la divinité du Christ .

L’Église ne dissimule rien au sujet du Christ, bien au contraire. Elle s’attache à suivre le commandement du Seigneur : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde » (Mat. 28, 19-20). Toute son histoire prouve sa fidélité à répandre la connaissance de l’Évangile, pour faire rayonner l’amour du Christ sur la terre et rendre les hommes heureux et meilleurs.

Que penser de ces « premiers textes chrétiens » (p. 276), que l’Église aurait détruits ou dissimulés en faveur de la divinité de Jésus-Christ ?


Les manuscrits de la Mer Morte, découverts en 1947, ne donnent aucun renseignement sur la vie des chrétiens et leur religion. La bibliothèque gnostique de Nag Hammadi, découverte en 1945, est datée du 4ème siècle. Aucun secret n’y a été découvert. Les apocryphes en question dans le Da Vinci code (Évangile de Philippe et de Marie) sont tardifs et sans rapport réel avec un quelconque apôtre.


Négationnisme au service de la haine

Cette fable gnostique contemporaine n’a rien d’une innocente fiction. C’est une redoutable occasion de donner libre cours à la haine du Christ et de ses disciples. L’Église est soupçonnée d’être un groupement d’intérêts occultes, parasitaire, dissimulateur, conspirateur et donc dangereux. Nul besoin de niaises moqueries, de critiques fondées, d’arguments tangibles, on abandonne les chrétiens au murmure.

À la longue, cette suspicion emporte le jugement et encourage l’élimination de ce qui apparaît comme une sourde menace. Les pamphlets assassins de l’empire néronien n’ont-ils pas appelé trois siècles de persécutions sanglantes ?

Dans ce fatras gnostique, la religion chrétienne est tristement dépréciée en un ramassis de minables petits secrets.


-Abbé Marc Vernoy, fsspx