mercredi 5 avril 2017

« Système » et Révolution

Si le peuple voulait prendre conscience de ce qui se trame contre lui il se demanderait, devant l'imminence du
Colonel Pierre Chateau-Jobert
danger, comment on a pu en arriver là sans qu'il s'en aperçoive. Il serait effrayé de la malignité d'un adversaire qui, depuis des siècles, prépare « à petits pas » l'asservissement de l'humanité. Actuellement, il n'y veut pas croire et même le communisme trouve dans les familles aisées et chez les « bourgeois » une passivité conciliante qui est la preuve la plus flagrante de la pénétration et de la gravité du mal.

Par ailleurs, quand on parle d'un « marxisme » ou d'un « libéralisme » qui abolit la liberté, on est tenté de voir là des notions abstraites, donc peu dangereuses, alors que ces deux conceptions, communisme et libéralisme technocratique, aboutissent l'une et l'autre à une exploitation de l'homme en lui refusant le respect de ses droits.

Ce mal, depuis longtemps, a pour nom la « Révolution ».

Dans les Pays encore libres, à part les Espagnols et les Portugais peu de gens se préoccupent de ce qu'est la Révolution. Certains, cependant, sans s'en soucier pour autant, en connaissent très bien l'un des aspects, celui que l'on nomme en France le « Système » : système politique pourri qui se remplace par lui-même à tous les changements de gouvernement ou de République. Ce système, inexorablement, mène la France à sa perte : une France déjà réduite à son « hexagone » métropolitain, qui lui-même sera bientôt « désintégré » dans un ensemble plus grand ; une France dans laquelle les Français ont perdu la liberté de s'exprimer et bientôt la liberté de penser ; une France dans laquelle les Français sont prêts pour l'esclavage.

Mais quel est le pays dit « libre » qui ne subit pas les mêmes attaques ? Toutes les Nations supportent la pression de plus en plus lourde des systèmes révolutionnaires qui pénètrent habilement dans les structures des Etats, gangrènent leur élites et leurs institutions.

Tout comme les hommes, les peuples croient facilement que ce qui arrive aux autres ne risque pas de leur arriver. Celui qui n'a pas eu sa guerre d'Espagne, sa terreur soviétique ou sa répression hongroise, s'imagine que c'est là l'affaire des autres. Chacun se croit un cas particulier sans rapport avec les manifestations d'une Révolution mondiale qu'il méconnaît.

Ainsi le Français, par exemple, ne connaît qu'une révolution : celle de 1789, dont il n'est pas peu fier parce qu'on lui a toujours caché l'origine et le véritable but du renversement de l'ordre existant.

Il ne fait pas de doute que cette révolution a entraîné nombre d'hommes de bonne foi qui se félicitèrent d'une « déclaration des droits de l'homme » et d'un renversement des princes régnants pour faire place à des républiques. Mais, dépassant le contexte du moment, cette révolution apparaît bien comme l'expression d'une force voulant rejeter tous les aspects d'un ordre subordonné à la morale. Et là est le véritable objectif de la « Révolution ». Trompés par d'habiles propos, les hommes crurent que les idées révolutionnaires leur apportaient des notions toutes nouvelles : la liberté, l'égalité, la fraternité (alors que, depuis des siècles, nombre d'autorités spirituelles s'efforçaient d'en faire prendre une conscience très exacte et, celle-là, non déformée).

L'idée de révolution est alors devenue synonyme de progrès civilisateur ; cette idée a franchi les frontières et les peuples s'y sont laissé prendre, alors qu'en réalité, derrière ces apparences, se trouvaient sapés les principes de morale, d'autorité, de responsabilité, qui sont les seules vraies garanties contre les abus des puissants.

La commission Parent : américanisation du système
d'éducation
Ce ne sont pas les peuples qui gagnaient, ce sont ces puissances qui maintenant s'appellent Communisme ou Capitalisme d'Etat, celui-ci n'ayant qu'un but : le profit, celui-là qu'un dessein : l'asservissement des hommes fondus en une masse où l'individu ne compte plus.

Suivant une tactique maintenant bien connue, c'est l'homme lui-même qui a été incité à réaliser, et dans l'enthousiasme, les premières « victoires » qui sont en réalité celles de ses ennemis. Ceux-ci ne se sont plus faute de parler - et le clan libéral autant que l'autre - du triomphe de la révolution en marche.[1]

Mais pour le Français, comme pour beaucoup d'autres, « révolution » est encore synonyme de révolte armée, de violences, de troubles. Il ne cherche pas à savoir quelle « doctrine » ou quelle « philosophie » se cachent derrière ce mot. Parce qu'on le lui laisse croire, il s'imagine que tant qu'il n'y a pas de désordre il n'y a pas de révolution. Alors que l'épisode révolutionnaire de 1789 n'était que la forme violente d'une révolution qui se poursuivait et qui est encore responsable de la situation actuelle !

Comment prétendre, pourrait-on demander, qu'en 1789 l'action populaire ait été déjà guidée pour contribuer à la victoire finale du Haut-capitalisme et du Communisme dont les noms n'étaient même pas employés à l'époque ?

C'est que les formes subversives ainsi désignées ne sont que des expressions actuelle de la Révolution, laquelle s'élaborait bien avant 1789 et dont les idées ont inspiré ensuite toutes les révolutions françaises, italiennes, russes, etc. Elles peuvent aussi bien s'appeler Démocratie Libérale ou Fascisme ou Nazisme. Demain elles s'appelleront Neutralisme, Mondialisme, Libertisme, ou n'importe quoi ; et la Révolution, la même, sera toujours en marche.

« La Révolution française, disait en 1793 Babeuf, n'est que l'avant-courrière d'une révolution bien plus grande, bien plus solennelle et qui sera la dernière. »

Qu'il s'agisse du Haut-capitalisme d'une part, ou du Communisme avec ses dérivés titistes ou progressistes d'autre part, les puissances apparentes ou occultes du monde se rattachent à l'un ou l'autre de ces deux clans, ennemis, mais qui se rejoignent dans leurs buts : chacun d'eux veut réaliser à son profit un gouvernement mondial qui lui assure la domination totale et définitive de l'humanité et des ressources de la terre. Pour y parvenir, ces deux forces doivent détruite les structures existantes pour substituer à l'ordre naturel un ordre qui soit le leur. Elles sont donc également subversives et aussi totalement subversives l'une
que l'autre.

Et, pour détruire les structures de la société, il faut démolir les principes qui peuvent en garantir la cohésion et l'harmonie. Il faut les anéantir car ce sont eux qui, précisément, sont les derniers remparts de l'homme libre, et qui gênent les ambitions, les égoïsmes, les crimes du Libéralisme ou du Communisme.

Est « Révolution » tout ce qui va contre l'ordre naturel et qui, en particulier, s'oppose à la dignité de l'homme, à ses droits et à l'exercice de ses devoirs en tant qu'homme mais aussi en tant que membre d'une société ou d'une nation.



-Colonel Pierre Chateau-Jobert, Manifeste politique et social. Diffusion de la Pensée Française. Chiré-en-Montreuil, 1973. Pp. 17-20.



[1] Cf. Nesta H. Webster, Secret Societies and subversive movements : « Le but de la Révolution n'est pas le socialisme, ni même le communisme ; ce n'est pas un changement dans le système économique actuel, ce n'est pas la destruction de la civilisation dans un sens matériel. La révolution désirée par les chefs est morale et spirituelle, c'est une marche d'idées dans laquelle toutes les bases admises jusqu'au XIXe siècle seront renversées. »