mardi 27 septembre 2016

La Bible de Luther

Luther ne fut-il par le premier à traduire la Bible en langue vulgaire? Pourquoi les catholiques d'alors ont-ils fait une opposition si forte à sa traduction?


Luther ne fut certainement pas le premier à traduire la Bible. Sa traduction du Nouveau Testament parut en 1522 et celle de l'Ancien Testament en 1534. Or de 1466 à 1522 les catholiques avaient déjà publié quatorze traductions de toute la Bible dans la Haute-Allemagne, à Augsbourg, Bâle, Strasbourg, Nuremberg et cinq dans la Basse-Allemagne, à Cologne, Delft, Halberstadt et Lübeck. Pendant cette même période de temps, ils avaient publié cent cinquante-six éditions latines et six éditions hébraïques de la Bible, sans compter les traductions complètes: onze en italien, dix en français, deux en bohémien, une en flamand et une en russe.

Les catholiques ont fait une forte opposition à la traduction de Luther, parce que, comme le dit Emser, il avait changé et tronqué sciemment le texte antique et vénérable reçu par toute l'Eglise chrétienne; de plus il l'avait accompagné de gloses et de préfaces remplies de propositions hérétiques; presque partout il avait interprété l'Ecriture dans le sens de sa doctrine de la foi sans les œuvres, là même où il n'est question ni de la foi ni des œuvres. Emser compta plus de quatorze cents passages qui avaient besoin de correction; un savant protestant Bunser en mentionne trois mille. Luther se moqua de l'Ecclésiaste, rejeta l'épître aux Hébreux et l'Apocalypse, omit les deux livres des Macchabées qui recommandent de prier pour les morts, appela l'épître de saint Jacques une épître de paille parce qu'elle contredit clairement la doctrine de la foi sans les œuvres, pervertir délibérément les épîtres de saint Paul. Dans l'épître aux Romaines, 3, 28 le texte porte: "Nous devons reconnaître que l'homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi." Luther traduit: "Nous devons reconnaître que l'homme est justifié sans les œuvres de la loi, et seulement par la foi." À ceux qui lui reprochaient une telle licence, il répondit: "Si votre papiste veut continuer son vain tapage à propos du mot seulement, je me contenterai de lui répondre: Le docteur Martin Luther veut qu'il en soit ainsi; il dit: papiste ou âne, c'est la même chose; je l'ai voulu ainsi, je le décide ainsi, ma volonté suffit, et fait loi,"

Nous comprenons facilement pourquoi la traduction de Luther fut condamnée dans le duché de Saxe, d'Autriche, dans la marche de Brandebourg, pourquoi aussi les savants catholiques lui opposèrent des traductions orthodoxes.


P. Adrien Malo OFM, La boîte aux Questions. Librairie de l'Action catholique. Québec, 1938. P. 79-80.