jeudi 22 septembre 2016

La primauté de saint Pierre

Y a-t-il quelque preuve biblique que le Christ a établi Pierre premier pape? Les apôtres n'étaient-ils pas tous égaux?

L'Eglise catholique croit que saint Pierre fut le chef des apôtres, exerçant par la volonté du Christ, le
suprême pouvoir de gouverner l'Eglise. Le concile du Vatican dit: "Si quelqu'un dit que le Christ, Notre-Seigneur, n'a pas établi le bienheureux Pierre prince de tous les apôtres et chef de toute l'Eglise militante, ou soutient que cette primauté est purement d'honneur et non de juridiction réelle, reçue directement et immédiatement du Seigneur Jésus, qu'il soit anathème."

À trois reprises différentes le Christ parle de la primauté de saint Pierre sur les douze apôtres.

a) Après la confession de sa divinité par Pierre, il lui promet une récompense en ces termes: "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne prévaudront point conne elle. Et je te donnerai les clefs du royaume des cieux; et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux."

1. La métaphore de la pierre se comprend facilement. Le Christ, la pierre, la pierre angulaire de l'Eglise, promet à Pierre de le faire la pierre sur laquelle sera bâtie son Eglise. Il s'adresse à lui seul "je te dis", non aux autres apôtres. Il agit comme l'homme prudent de la parabole. La pierre fondamentale d'un édifice lui donne l'unité, la force, la cohésion et la stabilité. Dans une société, ce rôle revient à l'autorité du chef.

2. Le Christ énonce le motif pour lequel il bâtit ainsi son Eglise: les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. Le sens obvie, qu'il s'agisse de l'enfer des damnés ou du royaume de la mort, est que l'Eglise du Christ résistera toujours victorieusement.

3. En Orient le symbole des clefs signifie pouvoir et autorité, et la concession des clefs, la concession du pouvoir. Aujourd'hui encore, pour honorer un visiteur de marque, nous lui donnons les clefs de la ville. Quand nous vendons un édifice, nous en remettons les clefs au nouveau propriétaire. D'Eliacim qui devenait intendant à la place de Sobna Dieu dit: "Je mettrai sur son épaule la clef de la maison de David; il ouvrira et personne ne fermera; il fermera et personne n'ouvrira."

Le don des clefs est donc une investiture: le maître garde son pouvoir sur la maison, mais il en délègue l'exercice à un majordome. Jésus a la clef de David, il la donne à Pierre; l'autorité de Pierre est donc celle de Jésus. Les mesures qu'il prendra sur la terre comme fidèle majordome seront ratifiées dans le ciel.

4. Lier, délier pour les rabbins du temps de Notre-Seigneur signifiaient déclarer permise une chose défendue. Ici, ils indiquent clairement que Pierre, l'intendant de la maison du Seigneur, possède le pouvoir, non pas de déclarer probables des opinions spéculatives, mais d'enseigner, de gouverner et de sanctifier. Celui qui refuse d'obéir doit être regardé comme un "païen et un publicain".

b) La nuit avant sa mort, Jésus dit à Pierre: "Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamé pour vous cribler comme le froment; mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères". Satan a voulu éprouver Pierre comme jadis Job. Le Christ dit à saint Pierre que s'il a prié pour tous les apôtres, il a spécialement prié pour lui, afin qu'il pût confirmer les autres. "En protégeant saint Pierre, dit le protestant Bengel, dont la ruine aurait entraîné celle des autres, le Christ les a tous protégés. Tout ce discours de Notre-Seigneur suppose que Pierre est le premier des apôtres dont le sort est lié au sien." Le Christ prophétise qu'un jour saint Pierre niera connaître Jésus. Tout comme l'Eglise est la colonne et la base de la vérité, ainsi saint Pierre est le soutien de la foi de ses frères. La promesse rapportée par saint Luc correspond parfaitement à celle de saint Matthieu. Dans les deux cas, Simon défend l'Eglise contre Satan et les puissances de l'enfer; il est le roc solide sur lequel l'Eglise sera bâtie.

Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise
c) Après la résurrection, le Christ conféra à saint Pierre la primauté qu'il lui avait promise deux fois. Simon, fils de Jean, lui dit-il, m'aimes-tu plus que ceux-ci? Pierre répondit: Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. Jésus lui dit: Pais mes agneaux. Simon, fils de Jean, lui dit-il une seconde fois, m'aimes-tu? Pierre répondit: Oui, Seigneur, vous savez bien que je vous aime. Jésus lui dit: Pais mes agneaux. Simon, fils de Jean, lui dit-il une troisième fois, m'aimes-tu? Pierre fut contristé de ce que Jésus lui demandait pour la troisième fois: M'aimes-tu? et il lui répondit: Seigneur, vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime. Pais mes brebis, lui dit Jésus.

Le concile du Vatican définit que, par ces paroles, le Christ a conféré à Pierre seul la juridiction du pasteur suprême.

La triple question de Notre-Seigneur rappelle à Pierre son triple reniement et aux autres apôtres l'excellence de l'amour de Pierre. Aussi Notre-Seigneur lui a-t-il confié une charge plus élevée. Pierre, cette fois, ne se vante pas, mais il s'en remet à l'omniscience du Seigneur.

Le symbolisme est clair. Le Christ s'est appelé le bon pasteur, plusieurs fois prédit par les prophètes. Divin chef de tout le troupeau, il établit Pierre à sa place, avant de retourner vers son Père. Le pouvoir suprême d'enseigner, de juger, de gouverner, il le délègue à Pierre qui enseignera, jugera, gouvernera en son nom.

En réalité, la primauté de Pierre est indiquée en plusieurs passages du Nouveau Testament. À la première rencontre avec Jésus il reçoit un nom qui annonce son rôle futur, il apparaît toujours le premier dans la liste des apôtres, prend figure de chef. Après la résurrection, il préside à l'élection de Mathias, le premier prêche l'Evangile, fait des miracles, déclare l'universalité de la mission de l'Eglise, reçoit un païen converti, juge Ananie et Saphire, préside le concile de Jérusalem.


P. Adrien Malo OFM, La boîte aux Questions. Librairie de l'Action catholique. Québec, 1938. P. 142-145.